samedi 30 décembre 2017

Aux instru, citoyens!

L'air de rien
de cours en cours
d'heures de frappe
en heures de pincements
de toere
en ukulélé
la petite équipe de chez Avril
tout âge confondu
forme une sorte
de groupe.
Une famille?
Presque.
Les enfants avouent que
"ça fait pas peur de jouer ici"
Même si les autres vous regardent.
Mais quand il faut jouer dehors
alors là
"On a honte! le coeur fait tum tum tum!"
Ils jouent pourtant
appelés par le maire
quand on lève les couleurs
et au 14 juillet aussi.
Tum tum tum
comme un toere.
On l'a tous vécu, non?
Ecoutez-les dans "Instantanés du monde, à Hauti" (cliquez ici pour entendre les confidences de ces apprentis musiciens)
Photographie©Anne Bonneau

vendredi 29 décembre 2017

Traditionnel, disent-ils

C'était pour éviter de les perdre
ces mélodies
ces sons
ces chants
qu'Avril a décidé
de les ouvrir
aux enfants.
De proposer
de se replonger
dans les instruments d'antan.
Même si c'est un antan jeune
comme le ukulélé.
L'important c'était d'alpaguer les enfants
avec des fakete
ou des pahu en plastique
s'il le faut.
Au coeur de la répétition
Avril a tout de même inséré
un petit essai
de percu
sur galets.
Des galets tout simples
trouvés dans la cour.
Pas sophistiqués pour un sou
mais très efficaces...
Ecoutez-les
Photographie©Anne Bonneau

jeudi 28 décembre 2017

Sans les mots

Il y a bien quelques traits
quelques points
quelques ponts
quelques TA RA
écrits sur le tableau noir.
Mais pas un mot
dans ce cours de toere.
Tout passe 
par les yeux.
L'observation
des plus grands.
Les petits dérapent
s'accrochent aux rythmes
au TA RA
et aux yeux du prof.
Et ça joue.
concentrés
sans sourire
"On peut pas rire!
Si, quand on se trompe, on rit, quand même!"
Ecoutez ces petits passionnés
du toere
dans "Instantanés du monde à Hauti" (cliquez ici pour entendre l'émission)
Photographie©Anne Bonneau

mercredi 27 décembre 2017

Tu seras musicienne, mon fils

Elle parle
elle parle
qu'est ce qu'elle parle
Avril
dans sa voiture de la poste.
Elle alpague les gens
leur tend les lettres
sort
bondit de sa voiture
et remonte
roule
et murmure aussi
"Ce que j'aime, moi, c'est la musique"
et monte le son.
Je le baisse
pas terrible pour l'interview.
Elle parle
elle parle
et dit des trucs
parfois 
étranges
comme
"même si t'es une femme, tu peux chanter, ici, hein"
C'est vrai
et jouer de la musique aussi
d'ailleurs
il y avait même cette petite
dans le cours de toere
au milieu des garçons.
Ouf.
Ecoutez-là, dans "Instantanés du monde à Hauti" (cliquez ici pour les entendre, toutes, chanter, et jouer)
Photographie©Anne Bonneau

mardi 26 décembre 2017

Pause déjeuner, pause ukulélé

Elle n'hésite à oublier
sa pause-déjeuner
Avril
pour aller jouer
du ukulélé.
Elle pourrait
elle pourrait
l'embraquer avec elle
dans son 4X4 de la poste
qu'elle fait tourner
chaque jour 
autour de l'île
telle une Marilyn
en virée.
Parce que son Amérique
c'est ça
à Avril
la musique.
Un passe-temps
qu'elle dit.
je dirais
un dévore-temps
à la voir
jouer
composer
enseigner.
Ecoutez-là, dans "Instantanés du monde à Hauti" (cliquez ici pour l'entendre jouer)
Photographie©Anne Bonneau

lundi 25 décembre 2017

Faire chanter

Elles se pressent
sitôt la cloche sonnée
vers le temple
où là
elles pourront
chanter.
Il faut les suivre
se plonger dans le culte
en langue Rurutu
et se laisser porter
par des polyphonies
que l'on ne peut saisir
qui semblent ne jamais
vouloir
s'arrêter.
Plus complexes
plus raffinées
qu'ailleurs?
"Plus riche!" lance Gisèle
avec plus de notes dedans
et des subtilités
que l'on ne trouve qu'ici.
N'allez pas montrer trop vite votre enthousiasme hein
on n'est pas là pour s'émerveiller 
des performances
des chanteurs.
C'est juste
pour rendre gloire
à Dieu.
"Sinon, on chante dans les bringues, aussi, hein! "ajoute Avril
Ecoutez-les toutes
ces chanteuses de tous bords
dans "Instantanés du monde à Hauti" (cliquez ici pour entendre l'émission)
Photographie©Anne Bonneau

dimanche 24 décembre 2017

Pour de vrai!

Je suis arrivée en retard
à la répétition
ils étaient tous déjà là.
Contents de me voir
pas moins que moi!
Je me suis faite toute petite
enfin
j'ai essayé
et je les ai laissés jouer.
Mais bon
je croyais que c'était une répétition
ça prenait plutôt des allures de concert
pas du tout le genre de couac
et autres hésitations
d'une répèt normale.
Je me suis demandée 
s'ils ne s'étaient pas entraînés avant
deux heures durant
juste
pour m'impressionner.
J'ai insisté un peu auprès d'Avril
pour entendre les débutants
"mais ils sont tous débutants!"
Ah d'accord.
Et ces débutants-là
en 24 secondes nagra en main
ils comprennent tout de suite
et jouent
comme s'ils avaient fait ça
depuis toujours.
ça énerve un peu
quand on est un débutant
laborieux... (comme moi...)
Ecoutez-les, non mais écoutez-les
dans "Instantanés du monde à Hauti" (cliquez ici pour les entendre)
Photographie©Anne Bonneau

vendredi 22 décembre 2017

Des hommes déracinés

Plus question pour un homme
Rodriguais
de travailler comme autrefois
aux carrières
à produire des blocs de coraux
pour bâtir les maisons.
Interdit
le travail des mines ouvertes
en plein ciel.
Alors il faut
virer de bord
et pourquoi pas
aller pêcher
telle une femme
aller piquer l'ourite
et affronter les eaux.
Ecoutez la vie
des femmes
des hommes
mais sans doute pas des enfants
dans "Instantanés du monde à Petite Butte"
en cliquant ici.
Photographie © Anne Bonneau

jeudi 21 décembre 2017

Vivre de vent et d'eau fraîche

Il en faut
à Rodrigues
du vent
pour faire sécher
les ourites
piquées chaque jour
par les femmes-pêcheuses.
Quand il y en a trop
elles restent à quai
enfin
sur la grève
et encaissent alors
les allocations mauvais temps.
Un petit pécule
qui pousserait à la vocation
de certaines
vous explique
Nana Polimon.
Ecoutez la dans "Instantanés du monde à Petite Butte"
en cliquant ici.
Photographie © Anne Bonneau

mardi 19 décembre 2017

Piques et coraux acérés

On pourrait prendre ça pour le paradis
pêcheuse d'ourites
à l'île Rodrigues.
Seulement
le soleil frappe
les coraux coupent le pied
le sel ronge
et les ourites ne vaquent pas tendrement
dans les filets.
Filets que les piqueuses n'ont pas.
Une fouine
du bois et du fer
contre les vagues
des caleçons longs,
des bottes,
du courage.
Vivez une journée
avec Nana Polimon
piqueuse d'ourite
émérite
dans "Instantanés du monde à Petite Butte"
à écouter ici
Photographie © Anne Bonneau

lundi 18 décembre 2017

Les horizons arides

Des pêcheurs
des champs cernés de murets de roches noires
un flanc de colline aride
éjectant des rochers se frottant sur le ciel. 
Petite Butte. 
C’est ici que vit Jocelyne Polimon
dans ce village au Sud de l’île Rodrigues. 
Jocelyne
que tout le monde ici appelle Nana Polimon, 
a trois enfants. 
Elle se tourmente souvent pour leur avenir.
Une inquiétude qui n’entachait guère les nuits des mères
ces dernières années. 
Mais à Petite Butte
tout a changé.
Les regards ne se tournent plus vers l'horizon
ou alors
pas l'horizon naturel 
plat et bleu
des lagons.
Regard griffé par la roche
et encore
pas n'importe laquelle.
"Instantanés du monde à Petite Butte"
Photographie © Anne Bonneau

vendredi 15 décembre 2017

Valorisation des déchets

Prenez une île
pas bien grande
pas de quoi creuser
des trous énormes
pour un enfouissement
au pourrissement incertain
-juste la mémoire
qui pourrit
doucement.
Prenez une île donc
et faites en sorte
que rien ne se perde
et que tout se transforme.
Ici
à Anse Réunion
on sait faire.
La noix de coco
on la casse
on fait du coprah
on extrait l'huile
avec un moulin
et un taureau
le taureau mange les restes
des noix sans huile
les coques
font carburer le calorifère
pour sécher les noix
le taureau laisse des traces
posées fissa
au pieds des plantes
qui poussent mieux ainsi.
Photographie©Anne Bonneau

jeudi 14 décembre 2017

La fin des cocos

C'est la fin
qui a encore besoin
aujourd'hui
des cocos?
Alors que la terre
peut être vendue si cher
alors que l'on déverse
chaque jour
des mannes
des antipodes
par bateau
par cargo...
Qui a encore besoin
de s'user la peau
à faire
de l'huile de coco
aux Seychelles?
Je leur demande.
Maeva répond
qu'elle n'encourage personne
à manger ça
trop gras.
quand elle dit personne
ça vaut pour les étrangers.
Ici
sur l'île de la Digue
on cuisine encore allegro
avec les quelques cocos
rescapés
de la ruée
au foncier
Photographie©Anne Bonneau

mardi 12 décembre 2017

Foin de nostalgie

D'un coup sec
avec son sabre affûté
elle décapsule
la noix de coco
Maeva. 
C'est sans appel.
Dans ses mots
c'est pareil
pas question
de  niaiser.
Pas question
de s'ébattre en nostalgie
sur le temps d'antan
qui était mieux avant.
Monsieur Ernesta est bien d'accord
il égrène les noms d'îles
où l'on faisait le coprah
ça sonne joli
à mes oreilles
il me les nettoie d'un coup.
Un boulot de forçat.
Là.
Foin de nostalgie
on va pas pleurer non plus
faut le faire
on le fait
demain
on verra...
Photographie©Anne Bonneau

lundi 11 décembre 2017

Le passé en fumée

Il reste une ferme ou deux
sur cette île
pas plus.
Surtout en bas
sur la côte.
Cette île
c'est la Digue
une des plus touristiques
s'il en est
des Seychelles.
Il reste une ferme
avec une petite plantation
de cocotiers
qui produisait
autrefois
l'huile
indispensable
en milieu insulaire.
Depuis
la terre agricole
a changé de nom
et ici
à la ferme de l'Union
on s'emploie
et on emploie
à tour de bras
pour que les feuilles sèches
des cocotiers
disparaissent
dès potron-minet
ça ferait tâche
sur les photos des touristes.
Ecoutez la vie dans cette ferme
un peu particulière
Photographie©Anne Bonneau

vendredi 8 décembre 2017

Trop frais

Vous avez le choix
sur les routes du Rajasthan.
Vous arrêter pour boire un thé
y'en a partout
à toute heure du jour
et de la nuit
ou alors
un soda
souvent pas très frais
même quand il est
dans une vitrine
réfrigérée
et puis aussi
un gobelet d'eau
nettement plus frais
dans un pot en terre
sur lequel
on a envie
de poser
son front.
Jusqu'à quand
ces vases patinés
resteront-ils
encore
en devanture?
Tant que les vitrine réfrigérées
brasseront
le même air
que la canicule
environnante
sans doute...
Ecoutez d'autres histoires
du chaud
et du frais
Photographie©Anne Bonneau

jeudi 7 décembre 2017

Les fuites

Autrefois on s'y mettait tous
le village tout entier
allez, à la pioche 
à la pelle
et c'est parti.
Branle-bas de combat
pour creuser
les bassins
de récupération
des eaux pluviales.
Et puis
après
les instances coloniales
puis le gouvernement
s'en sont mêlés
et on s'est dit
ayé
le problème de l'eau
est réglé.
Mouais.
Aujourd'hui on réalise
que si l'on ne remet pas
la main à la terre
pas grand chose
ne se fera.
ça n’empêche pas
les petits futés
les gros bonnets
de profiter
de la manne
céleste...
Ecoutez Monsieur Karmekam
dévoiler les rouages
des fonds
alloués
à l'eau
Photographie©Anne Bonneau

mercredi 6 décembre 2017

Roue persane et autres figures acrobatiques

C'est pas un exercice de gym
ou une figure de patinage artistique
avec un nom pareil.
En vérité en vérité
ce n'est pas une roue persane
mais une Araghatta.
Ah.
Ce n'est pas un truc de Kama Sutra
c'est ça
cette roue archaïque
qui permet
de remonter les eaux
par la seule force
des buffles
et d'un savant imbroglio
d'engrenages.
C'est aussi
un vertige
que se tendre le cou
dans ce puits ouvert
aux parois couvertes
de mousses 
et de fougères
quand tout autour
la terre crépite.
Photographie©Anne Bonneau

mardi 5 décembre 2017

Oasis

Tout autour, ça brûle
le soleil
la poussière
les klaxons perpétuels
les cris 
et le pétaradage, voire la pétaraditude 
des rickshaws, motos, scooters
et autres véhicules
motorisés
non identifiés.
Et là
sous le manguier
ces pots de terre
qui invitent
à la pause.
De l'eau fraîche
à disposition
du chaland
respectueux
forcément respectueux.
Enfin
les gobelets
sont tout de même attachés
par une mince ficelle
aux branches du manguier
qu'on ne tente pas
de garder par les routes
cette parenthèse fraîche
au creux de la main
au fond de la poche...
Ecoutez ces moments
minuscules
et
essentiels
Photographie©Anne Bonneau

lundi 4 décembre 2017

A la volée


On dirait comme ça
à voir cette auguste machine
qu'elle travaillerait
normal
en ligne
et que j'en trace une
et que je m'en retourne
sans surprise.
Sauf que
vous êtes en Inde, là.
Donc
pas obligé 
de faire 
tout droit
tout rectiligne
tout bien dans les clous
etc.
Alors, la méthode ici
c'est de balancer
des grains de maïs
à la volée
devant le tracteur
et que la herse
hop
les enfouisse en terre fissa.
Je ne sais pas
si la musique à fond
dans le tracteur
est là
pour faire s'envoler les aigrettes
qui viennent piquer 
dans la terre fraîche
ou juste
pour donner
un côté Bollywood
au boulot.
Ecoutez-ça
Photographie©Anne Bonneau

dimanche 3 décembre 2017

Eau courante

Elle est partout
normal
elle est nulle part
l'eau
en ces contrées arides
alors elle est partout
à chaque coin de rue
ces pots de terre cuite
qui gardent l'eau fraîche
fraîche
même
par canicule ordinaire.
Des pots que la municipalité
ou les particuliers
mettent à disposition
des passants assoiffés.
Ecoutez Dinesh le potier
en parler
Photographie©Anne Bonneau

vendredi 1 décembre 2017

De la beauté

Pour savoir ce qu'on a le droit
le devoir
de montrer
quand on est dans la rue
en Tunisie
nous sommes parties, Inès et moi
dans les salons de beauté
histoire d'entendre parler
des usages
de la bienséance
et autres protocoles
histoire de savoir
en quoi cela engage
de sortir
attifée ou pas
dans la rue.
Nous voilà atterries chez Souhad
et à la porte
on ne peut que buter
sur le bagou de Suzanne.
Dès qu'elle dit "Mon fiiiiiiiiiils!"
je vous jure
c'est comme si vous y étiez!
Là, dans le salon de Souhad
on parle du dehors
avec des airs craintifs
mais là, entre le bac et le séchoir
derrière le rideau de lamelles de plastique anti-mouche
on jase
on cause
on chante
on rit
on se montre son dernier soutif
les sms de son chéri
bref
la vie.
Ecoutez-la, dans "Instantanés du monde, dans les rues de Tunis" (cliquez ici pour l'entendre)
Photographie © Anne Bonneau