mercredi 31 octobre 2018

Sans paillette

Pour causer cinéma
à Bombay
on est allé voir un cinéaste!
Logique facile
mais attention
pas de cliché facile
celui-ci
n'est pas particulièrement porté
sur Bollywood
ni
sur la paillette.
Certes John Matthew Matthan vit et travaille à Bombay, 
mais il a été nourri des auteurs Satyajit Ray
Shyam Benegal 
et confrères de la même farine.
Autant dire bien loin des succès populaires connus… 
Foin de clichés ! 
D’ailleurs, ils sont boutés hors des frontières du préjugé en matière de cinéma indien
dès que Monsieur Matthan vous reçoit chez lui : 
pas obséquieux pour un sou
pas star du tout
plutôt raffiné dans sa maison meublée d’antiquités
que traverse une belle-mère discrète
une épouse chaleureuse
et un labrador grassouillet
qui vient lui lécher les pieds. 
John Matthan fait des films à succès, longuement médités.
Ecoutez-le dans "Instantanés du monde à Vile Parle"
Photographie©Anne Bonneau

lundi 29 octobre 2018

Dans le décor

C'est pas pour casser les rêves
mais juste
parce que c'est souvent plus intéressant
de voir ce qui se passe
derrière le décor
dans le décor
sur le décor sans les lumières
sans le filtre de la caméra
des ajouts de musique
et des maquillages
c'est pour toutes ces raisons
qu'on a voulu vous emmener
dans les studios Mebhoob de Bombay.
On y tourne toujours de vrais films
du Bollywood
des films d'art et d'essais
et des pubs
on y accueille des expos d'art contemporain
et la dynastie Khan est là
qui vous reçoit
dans un bureau-chambre-salon-bar
bref
catapultage des genres
c'est dans "Instantanés du monde à Vile Parle", moteurs!

vendredi 26 octobre 2018

Remmaillage

Sur le quai de Trou d'Eau Douce
il y a de ces heures de pointe
où tout le monde se rue
sur les barques
chargées 
de filets
argentés.
Et puis plus rien.
Seconde vague du jour
au retour
et puis
un petit flot
de ceux 
qui restent là
au milieu de leurs filets d'argents
à remmailler.
C'est là que c'est intéressant de traîner
et de se poser
pour voir
comprendre
entendre ce qui se dit
ce qui préoccupe
ce qui fait rire
ou fait souci
partager aussi
un sourire quand on ne comprend pas le créole
un bout de conversation
et pourquoi pas
une bière
une partie de domino.
C'est là que tout commence.
Je veux dire
la vie.
Photographie © Anne Bonneau

jeudi 25 octobre 2018

Garder la main

Ce n'est sûrement pas pour vendre
que Monsieur Didier
charpentier de marine de son état
se lance
dans une nouvelle 
carcasse
de barque.
Qui en voudrait à Trou d'Eau Douce?
Allons!
Depuis que l'extraction de sable est interdite
les carcasses
de barque
sont échouées 
sur les grèves
ici
et
là.
Non
c'est juste pour 
"garder la main"
que le charpentier
touche du bois.
Et puis aussi
pour lui
pourquoi pas
histoire d'aller se pêcher
un petit cari
de temps en temps.
Une façon
de garder
sa carcasse
en état.
Photographie © Anne Bonneau

mercredi 24 octobre 2018

Allez, dehors!


Pas de ciné
de théâtre
de café
pas de club
dans le village de Trou d'Eau Douce.
Pas de lieux publics?
Que nenni!
Mais plutôt des espaces
de l'espace
où l'on se rencontre
se parle
rie
joue
mange
ou pisse.
Il y a la plage bien-sûr
les avants des boutiques
et
le casino.
Un des lieux préférés de Barlen Pyamootoo
un lieu mal famé
un lieu de vie
de jeu
de rencontre
un espace
vivant.
Ecoutez l'écrivain en parler
Photographie © Anne Bonneau

mardi 23 octobre 2018

Marée de mots


Elles viennent bien avant le lever du jour
ou après
c'est selon
les marées
celles qui interdisent
ou permettent
d'avoir accès
à l'eau douce
à Trou d'Eau Douce.
Alors
à l'heure
où l'eau
coule
douce
sans les sels
de la mer
toute proche
elles viennent
à la toilette
dans les pénombres
puis
viendra le temps
sous le soleil brûlant
de la blanchisserie.
L'effort
battu par le vent
la pierre
et la force
et les mille histoires
racontées
entre deux eaux
entre murmures
et cascades de rires
sur tous les tons
par tous les temps.
Ecoutez les blanchisseuses
Photographie © Anne Bonneau

lundi 22 octobre 2018

Ecrire, enfin


Barlen s'est décidé
un jour
à venir
revenir
vivre
ici
à Trou d'Eau Douce.
Pour écrire
disait-il.
Trou d'Eau Douce
(avec toutes ces majuscules, je ne sais pas, en tout cas, pour moi, un lieu majuscule...)
ce n'est
c'est
-c'est selon-
un village
sur la côte Est de l’île Maurice
la venteuse
Trou d'Eau Douce
un village
populaire
"Où l'on vit comme des pauvres, mais joyeusement tout de même"
dit Barlen Pyamootoo.
Il y parvint
à écrire
enfin
pour notre plus grand bonheur
et le sien aussi sans doute
après
une longue route
écoutez-le
Photographie © Anne Bonneau

dimanche 21 octobre 2018

J'sais pas quoi faire


Je ne sais plus
s'il ne faisait que passer
ou s'il venait travailler là
avec Monsieur Didier.
Mais bon
son sabre
c'était sûrement pas
pour faire le charpentier
en tout cas
ni une ni deux
dans le feu de la conversation
le bonhomme se met à affûter sa lame
pas question de rester bras ballants.
C'est un peu l'esprit ici
au village
pas question de se la couler douce.
C'est un peu le problème qu' a rencontré
Barlen Pyamootoo
quand il a voulu se poser ici
pour écrire.
Assis dans son bureau
"à ne rien faire"
entendez, immobile
il passait pour une grosse feignasse
aux yeux des villageois.
Il n'a pas tenu longtemps.
Ecoutez-le raconter
la vie d'ici
et la pression sociale
des villages
où les voyageurs
croient 
qu'on se la coule douce
écoutez-le
Photographie © Anne Bonneau

vendredi 19 octobre 2018

Tout en haut

Il a décidé
Arthur
de vivre tout en haut

juste en bordure de la forêt
où l'on n'appelle plus ça un jardin
où le domestique et le sauvage s’emmêle.
Habitué qu'il est des hauteurs
des sommets
des éminences.
Arthur était le coiffeur des gouverneurs
quand les Seychelles vivaient encore à l'heure coloniale
il est devenu naturellement
le coiffeur des présidents.
Il raconte
la vie des hommes du sommet
et les mots
qu'ils échangent
au sommet de la colline
dans "Instantanés du monde à Anse étoile"
Photographie©Anne Bonneau

mercredi 17 octobre 2018

Au parloir

Il y a des endroits parfaits
pour se parler
des lieux improbables
mais qui tirent des mots
des ventres les plus tordus.
On ne dira jamais assez des vertus de la marche
pour laisser couler les flots des mots
 - un sherpa Himalayen m'a confirmé
qu'il faut trois jours de marche
pour se connaitre-
bien.
Les ruchers sont pas mal non plus
dans le genre
mains occupées
yeux occupés
calme obligé
délieur de langue.
Je vous emmène
dans un rucher seychellois
oui on va parler abeille
mais aussi
parler de la vie
ici
c'est dans "Instantanés du monde à Anse étoile"
Photographie©Anne Bonneau

lundi 15 octobre 2018

La nature et vous

Quelles relations entretenez-vous avec la nature?
Genre émerveillé total
ou total blasé?
Quand je suis arrivée chez Arthur
tout comme lorsque je suis arrivée
au fond d'une vallée marquisienne
je me suis frotté les yeux
en me croyant direct
dans une toile du douanier Rousseau
genre exubérance à foison
et une multitude de trucs
qui fait rebondir la rétine
ad libitum.
Oui, je suis du genre
total émerveillée.
Surtout quand je vois passer des bestioles
dans les cours d'eau
comme ça
à portée de main
(ça marche aussi avec tous les grands mammifères
qui passent
comme ça
à portée de main)
même extase.
Bref
y'avait des camarons
dans la rivière
qui passe chez Arthur.
Arthur n'est pas du genre à se lécher les babines
en regardant la rivière.
Rencontre avec un frugal rêveur
cette semaine
dans "Instantanés du monde à Anse étoile"
- comment voulez-vous n'être pas rêveur en habitant à Anse étoile!?-
Photographie©Anne Bonneau

vendredi 12 octobre 2018

C'est interdit


Pour faire
d'un village désolé
perclus de crevasses
et autres désolations terrestres
bref
un village
en milieu
aride
pour faire d'un tel lieu
un village modèle
Anna Hazare a bossé.
Il a commencé
par interdire
des tas de trucs.
L'alcool
la cigarette
le tabac en général
qui se fume ou se mâche ou se crache
mais aussi
faire trop d'enfants
tirer au flanc
faire des sacrifices d'animaux
cultiver la canne à sucre
les pâturages dans la montagne
l'abattage des arbres.
C'est tout?
Je suis sûre que j'en oublie...
Y'a de "bonnes" raisons à tout cela
Y'a des punitions, aussi.
vous raconte
pourquoi
comment.
A vous de voir
si la règle
vaut
la vertu...
Photographie©Anne Bonneau

jeudi 11 octobre 2018

Rangs d'oignons

C'est comme ça
qu'on commence la journée
à l'école du village.
En ligne
à ânonner des "Om" et autres "Shanti"
suivis d'un tonitruant "Jai Hind!" 
(la version indienne hurlée de cent voix d'un" vive la France")
par des gamins
ravis d'hurler
à plein poumons.
Rangs d'oignons
tenus
bien droits
par l'instit'
et son bâton.
Les mêmes rangs
que dans les champs
des parents
que les enfants
devenus grands
se devront
de cultiver.
Enfin,
la fille, de cultiver
le garçon de financer l’arrosage au goutte à goutte.
C'est le règlement.
Deux enfants.
Des plantations.
Ecoutez les règles de ce village modèle
Photographie©Anne Bonneau

mercredi 10 octobre 2018

Furtive rencontre


"Vous avez de la chance
Anna est en convalescence!"
C'est ce que nous avait dit
un des nombreux
attachés/conseillers/secrétaires/assistants/que-sais-je-encore
membres de l'aréopage
de Anna Hazare.
En convalescence
donc
présent
au village.
Pas à courir
dans tous les coins de l'Inde
pour rallier les foules
contre la corruption.
Mais
Anna était en convalescence
donc pas très frais-et-dispo
pour causer
dans mon micro.
On a passé quelques jours
chez lui
à ses côtés
je logeais même
dans le bungalow voisin du sien!
Ses gardes du corps
à ma porte.
Bon sang, je l'entendais respirer
et pas moyen 
de l'interviewer?
Eh eh
à force de
requêtes répétées et incessantes-mais -pas-trop-pour-pas-saouler-non-plus?
à force de
patience?
prières?
On a pu
enfin
discuter
avec lui.
Ses premiers mots:
"Je ne vois pas ce qui vous intéresse ici, c'est tellement différent de chez vous!"
Certes, certes, bon, alors, à ce propos, on a plein de questions!!!
Photographie©Anne Bonneau

mardi 9 octobre 2018

Leur Mecque à eux, suite

Eux aussi
sont venus de loin
ici
à Raleghan Siddhi.
Mais pas pour voir Anna Hazare.
Pas le temps.
En un mois
il leur fallait
voir un max de temples
alors c'est au pas de course
ou presque
qu'ils faisaient leur pèlerinage
et en chantant.
Je leur ai couru après
littéralement
croyez-moi, ils cavalaient!
Ça a fait rire les villageois.
J'ai partagé quelques foulées
de leur tonitruant
passage...
Écoutez
(on ne m'entends pas souffler comme un boeuf
sacré
après ma ruée.
Je sais
aussi
parfois
arrêter 
de respirer
quand ça enregistre...
Non mais!)
Photographie©Anne Bonneau

lundi 8 octobre 2018

Leur Mecque à eux


Ils sont venus de loin
du Bihar
pour voir
ici
le village 
d'Anna Hazare.
Ils ont fait les choses dans l'ordre
d'abord, le village de Gandhi
où ils se sont prosternés
devant sa maison natale
et dans la foulée
celui d'Anna.
Kalavadi en avait les larmes aux yeux.
Ils sont montés
avec leurs drapeaux
tout en haut de la colline
pour voir
de haut
à quoi ressemble
"un village vertueux"
Écoutez la petite dame en parler
Photographie©Anne Bonneau

dimanche 7 octobre 2018

Omniscient Anna


Il sait tout
il guérit tout
il est partout
ici 
à Raleghan Siddhi
Anna.
Anna Hazare
un p'tit gars du coin
qui a décidé
sa retraite militaire atteinte
de revenir
au pays.
Et de donner 
toutes ses roupies
au temple du village.
Premier pas
d'un chemin
qui mène
bon an mal an
à un village modèle.
Du coup il est là
entre Ganesh
et Siva
chez lui.
Écoutez le drôle de chemin
de celui qui veut faire trembler
les politiciens corrompus
de l'Inde
Photographie©Anne Bonneau